Ce mois-ci : L'Océan

"Tu ne traverseras jamais l'océan si tu as peur de perdre de vue le rivage." Christophe Colomb

à venir

avis

des lecteurs et des bibliothécaires

  • Rien ne s'oppose à la nuit : roman / Delphine de Vigan |

    Rien ne s'oppose à la nuit : roman / Delphine de Vigan Vigan, Delphine de (1966-....). Auteur

    Une saga tragique 3/5 Avec un livre comme celui-là on hésite entre deux et cinq étoiles. Mais lui en donner deux me laisserait comme un remords. Contrairement à ce qu’a pu ... Voir plus Avec un livre comme celui-là on hésite entre deux et cinq étoiles. Mais lui en donner deux me laisserait comme un remords. Contrairement à ce qu’a pu dire Céline, un livre ne se juge pas uniquement sur le style. Si on prend en compte l’intérêt de cette histoire familiale (malgré une accumulation d’anecdotes parfois « fadasses »), l’émotion qu’elle suscite, l’honnêteté avec laquelle elle est contée, on peut être porté à plus indulgence. Balançant entre les étoiles, je m’arrêterai donc à trois. Delphine de Vigan par la violente sincérité de ses propos, qui laissent sourdre par moments une vraie douleur, réussit à me toucher sans me laisser penser qu’elle pourrait dominer la littérature du XXIème siècle. Le grand-père de la narratrice, Georges, patriarche haut en couleurs mène une vie bien bourgeoise, bobo avant l’heure nous dit Delphine de Vigan, avec sa famille de neuf enfants et sa femme Liane. Certaines lectrices voient en lui la clef des malheurs de Lucile, la mère de Delphine. Elles ont peut-être raison. La narratrice donne la version de sa mère qui accuse son père de l’avoir violée en la droguant, mais fort honnêtement ne s’arrête pas à ce seul témoignage qui a du reste varié au gré des moments. Dans un texte écrit au crayon, Lucile a d’abord écrit « je ne sais pas s’il m’a violée », puis a barré cette phrase pour la remplacer par « il m’a violée ». Dans son journal, elle donne le bénéfice du doute à son père : « Je ne sais pas ». Manon, la sœur de Delphine, donne encore une autre version. Delphine est donc en proie à un doute existentiel : « Et si au cours de cette nuit, il ne s’était rien passé ? Et n’avait existé que la peur, cette peur immense, et l’inconscience qui l’a suivie… Nous ne saurons jamais ». Georges est déconcertant : ce hâbleur, ce monsieur je-sais-tout sur qui pèse ce lourd soupçon, est aussi celui qui invite des clochards à sa table, héberge des réfugiés de toutes origines, emmène le fils de sa concierge en vacances parce qu’il lui trouve le teint pâlichon. Et surtout s’occupe durant trente ans de son fils handicapé mental qu’il refuse longtemps de mettre dans une institution spécialisée. La grand-mère, Liane, est également un personnage assez déroutant : alors que dans sa famille on compte de multiples cas de personnes très perturbées psychologiquement, elle demande à son mari de lui faire douze enfants. De fait, ils s’arrêteront à huit (et même neuf après une adoption) après qu’elle a accouchée de Tom qui s’avérera trisomique. D’un conformisme apparemment total, elle bouscule néanmoins souvent toutes les catégories de son milieu. Le destin frappe cruellement cette fratrie puisque trois d’entre les fils mourront de mort violente, par accident pour le petit Antonin tout juste âgé de six ans, dans de douteux jeux sexuels pour Jean-Marc, l’enfant adopté à la suite de cette disparition, alors que le troisième fils se suicide. Lucile, la mère de Delphine, est évidemment le personnage central du livre, dont le destin tragique ne cesse d’interpeler l’autrice. Elle sombre au fil des pages dans une folie dont elle émerge pour des périodes de rémission plus ou moins longues après des crises paroxystiques au cours desquelles elle en vient à devenir dangereuse pour elle ou les siens. Dans un de ces délires elle tentera même de piquer les yeux de sa fille Manon, la sœur de l’autrice, avant d’être enfermée dans un établissement spécialisé. Le livre constitue pour son autrice une catharsis qui lui a permis de se réconcilier avec elle-même sans que cette forme de rédemption lui permette de tout comprendre. Il lui a donné aussi sans doute de renouer avec certains membres de sa famille. Je l’ai lu sans ennui, ému parfois, un peu comme on réagit à un bon « Faites entrer l’accusé », sans jamais toutefois me sentir subjugué par un style qui n’impose pas de vive accélération à nos rythmes cardiaques. Voir moins Yvon - Le 11 octobre 2024 à 11:26
  • Les yeux de Milos : roman / Patrick Grainville |

    Les yeux de Milos : roman / Patrick Grainville Grainville, Patrick (1947-....). Auteur

    Les yeux de Milos 3/5 Les yeux de Milos de Patrick Grainville Déjà dans le placenta, Myriam trouva les yeux de Milos très spéciaux, ils le furent effectivement vers ses dix... Voir plus Les yeux de Milos de Patrick Grainville Déjà dans le placenta, Myriam trouva les yeux de Milos très spéciaux, ils le furent effectivement vers ses dix ans. Zoé son amoureuse de l’époque lui lança du sable et quelques temps plus tard il éprouva des douleurs qui l’obligèrent à porter des lunettes pour se protéger. Myriam l’a ait appelé Milos suite à un séjour en Crête et son ancien roi Minos. Perturbé, Milos s sera suivi par une psy qu’il abandonnera rapidement. A 16 ans il découvre la sexualité avec Marine, ils sont anti pis et passent leurs journées à la place sous le soleil de la Méditerranée. Milos adore deux peintres, Picasso et Nicolas de Staël, exposés au musée dans le château. Lors d’un déjeuner avec Samantha, une amie de sa mère, cette dernière va lui faire des avances auxquelles Milos ne résistera pas d’autant qu’elle est particulièrement sexy et qu’elle écrit une thèse sur Picasso en juillet 1937. Cette relation va mettre à mal son lien avec Marine. Antibes, la mer, le soleil, le sexe tel est le fond du tableau que nous brosse Grainville et sur lequel vont se superposer des personnages, des artistes, Picasso, Nicolas de Staël, Man Ray, Dora Mar, Paul Eluard et les innombrables amants et maîtresses qui gravitèrent autour dans ces années 30/40. La figure du Minotaure plaquée sur Picasso est particulièrement bien vue. Milos faisant des études d’archéologie, se rajouteront sur le même principe, les grands sites préhistoriques de la Dordogne avec comme figure tutélaire l’incontournable expert de l’époque, l’abbé Breuil. C’est bien écrit, bien ficelé, bien documenté mais il y a dans tout cela un côté artificiel, des liens entre la Grèce, les artistes et Milos un peu forcés qui m’ont progressivement éloigné de ce livre et du plaisir de le lire. Malgré l’érudition de l’auteur, la mayonnaise n’a pas prise en ce qui me concerne. J’ai eu l’impression de lire une bio de Picasso, de Staël et de Breuil avec des interludes d’une histoire terriblement banale, celle d’un certain Milos qui confondra longtemps désir et amour. Voir moins M. LAVEZE Gérard - Le 11 octobre 2024 à 08:00

coups de coeur

des clubs de lecture