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Livre
N'oubliez pas leurs noms / Simon Stranger
Edité par Éditions Globe ; Impr. Corlet Imprimeur - 2021
Dans la tradition juive, on dit qu'un être humain meurt deux fois. La première lorsque son cœur cesse de battre et que son cerveau s'éteint, la seconde quand son nom est prononcé, lu ou pensé pour la dernière fois. Pour lutter contre l'oubli, des «pavés de mémoire», portant chacun le nom gravé d'une victime des nazis, ont été scellés partout en Europe, en face de leur dernier domicile. L'un d'eux, à Trondheim, en Norvège, porte le nom de Hirsch Komissar, assassiné le 7 octobre 1942. Il était l'arrière-grand-père de l'épouse de Simon Stranger. En cherchant à lui rendre hommage, l'écrivain découvre une histoire incroyable. La maison où s'installa le propre fils de Hirsch, Gerson, avec sa famille, à partir de 1948, est l'endroit même où Henry Oliver Rinnan, un agent double, avait installé son quartier général et une salle de torture pour les Juifs et les résistants. Une villa d'une banalité à pleurer, surnommée Bandeklosteret, le « cloître de la bande ». Pourquoi ? Ironie du sort ? Ignorance ? Ou désir de recouvrir le passé et de retourner le cours de l'histoire ? Ce livre, construit comme un lexique implacable, un puzzle de mots, de supputations et d'archives, est une tentative pour repousser la seconde mort et redonner vie à ce qui a disparu.
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N'OUBLIEZ PAS LEURS NOMS - Simon STRANGER
Un roman original tant dans sa constitution - un abécédaire où au lieu de chapitres numérotés, une lettre de l'alphabet qui va décliner des mots, et des situations en lien avec le thème du roman - que dans sa construction : une absence de chronologie linéaire - ce qui semble être devenue la norme littéraire actuellement. Nous sommes à Trondheim en Norvège dans les années 1940. L'auteur s'adresse à l’arrière grand-père de sa femme, Hirsch Komissar, qui s'est vu arrêter, déporter et fusiller, sans autre forme de procès ou d'explication. Se transformant en historien, Simon Stranger s'est rendu dans les archives, à l'étranger pour faire la lumière sur les évènements survenus en Norvège lors de l'occupation allemande, avec comme il se doit en pareille situation, la complicité de ressortissants du pays occupé, avides de pouvoir, de passe droits, d'avantages et de sang. C'est le cas d'Henry Oliver Rinnan, frustré depuis toujours et pour qui sa petite taille réclame vengeance et compensations pour toutes les humiliations qu'elle lui a valu. Tortionnaire, tyrannique, manipulateur, mesquin, aux ordres des SS et trop content de donner libre cours à ses penchants sadiques, il va se targuer - à juste titre - d'avoir démantelé et livré une majorité de réseaux de résistance norvégiens. Roman bien construit, nous apportant beaucoup d'informations sur l'occupation de la Norvège entre un Danemark occupé et une Suède libre, devenue refuge pour ceux fuyant le régime allemand. Roman qui nous fait également découvrir la démarche d'un artiste allemand Gunter Demnig qui a créé les "Stolperstein" "pierre d'achoppement" ou encore "pavé du souvenir", qui sont des pavés de 10 x10 cm recouverts d'une plaque de laiton signalant l'identité de celui qui a vécu à cet endroit et qui a été victime des persécutions contre les juifs. 67 000 pierres ont ainsi été incrustées dans les trottoirs de plusieurs villes d'Europe. Un hommage de cet artiste allemand tout comme l'est le roman de Simon Stranger. Le ton pondéré de l’auteur a réussi à faire un texte harmonieux en dépit de certains passages violents. Et parce que sans une traduction de qualité, rien n'aurait été possible, Jean Baptiste Coursaud mérite bien des éloges pour l'adaptation française du texte norvégien qu'il nous offre à lire.
Christiane - Le 15 février 2022 à 21:07