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"Les Ames mortes" de Wang Bing. L'appel aux morts / Nicholas Elliott
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A la fin des années 50, la Chine maoïste mène une violente campagne "antidroitière": des milliers de "droitiers" sont envoyés dans des camps de rééducation, tels les sinistres Jiabiangou et Mingshui. Condamnés à manger des racines et vivre sous terre, les prisonniers y meurent de faim par centaines. Wang Bing s'était déjà penché sur ce chapitre dans le documentaire "Fengming" (2007) et dans la fiction "Le Fossé" (2012). "Les Ames mortes" se compose surtout d'entretiens avec les survivants, chez eux ou sur les lieux des camps, aujourd'hui terres agricoles rachitiques, jonchées d'ossements des morts. La durée extraordinaire du film (8h26) ainsi que le temps accordé à chaque entretien, les longues séquences où la caméra déambule silencieusement parmi les charniers, l'ombre du cinéaste se glissant dans le cadre pour signaler sa présence à la fois humble et intime, indiquent que ce retour à Jianbiagou n'a rien d'une redite : il est pour Wang Bing de l'ordre du devoir-devoir de mémoire qui n'a que trop de sens au présent. Sommaire. L'appel aux morts. Rendre la parole, entretien avec Wang Bing.
Voir le numéro de la revue «Cahiers du cinéma, 748, 01/10/2018»
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